Art-thérapie





Il y a deux jours, je me suis retrouvée un peu par hasard face aux vidéos et murs de texte d'Esther Shalev-Gerz au Jeu de Paume.
De l'art au témoignage, ardent et citoyen, il semblerait qu'il y ait un monde, et pourtant...
Il y était question d'émigrés dans une petite ville de Suède, de Samiis échoués à Stokholm, d'ouvrières etde filles d'ouvrières d'une usine textile aujourd'hui disparue, mais aussi et surtout de Walter Benjamin, d'Auschwitz, et de Buchenwald.
Une vidéo retrace notamment une expérience de théâtre participatif qu'ont menée en 1998 à Berlin Esther Shalev et Jochen Gerz à partir d'une pièce écrite dans les soixante: mêlant témoignages de victimes et minutes du procès d'Auschwitz, ils ont enrôlé les spectateurs, les médias (un journal, une radio) pour relayer l'oeuvre en progrès, invitant chacun à incarner activement le texte qui leur était donné, dans l'enceinte du théâtre, au micro du studio de radio, par voie d'annonce dans un quotidien.
Je suis frappée par l'efficacité et la force de la démonstration: par sa beauté aussi, sans trop savoir si on peut parler de beauté ou plutôt d'exaltation et d'émoi.
Car il s'agit d'abord de se souvenir soi et de faire que les autres se souviennent absolument, s'approprier une douloureuse histoire pour la retranscrire et la porter devant ses contemporains.
Il en va différemment de la pièce Verfügbar aux enfers, l'opérette caustique pleine de drôlerie et d'humour noir que Germaine Tillion a écrite à Ravensbrück pour donner corps à l'existence infernale de ses camarades prisonnières (dont le livret existe en poche au Seuil; lire aussi et surtout Ravensbrück, et Fragments de vie, édité par Tzvetan Todorov au Seuil).
Idem encore pour un curieux ouvrage paru il y a trois ans, sobrement intitulé Notre combat.
Ce livre préfacé par Simone Veil n'est autre qu'un exemplaire de Mein Kampf biffé, repeint, réécrit, caviardé, découpé, orné, taggé par Linda Ellia, peintre et photographe, et par quelques autres graphistes ou illustrateurs complices.
Les deux oeuvres parviennent à leurs fins de façon percutante, présentant les mêmes vertus cathartiques sous des allures moins solennelles et didactiques et avec un point de départ autrement plus conjoncturel et subjectif: un vieux volume trouvé dans la cave familiale pour celle-ci.... des années en déportation parmi les divisions de prisonnières les plus corvéables du camp de Ravensbrück pour celle-là.
Je pense enfin à Charlotte Salomon, à l'histoire familiale intense et troublée, morte en déportation, et dont les 1300 gouaches et le projet inachevé de pièce chantée m'ont laissé un souvenir poignant.



Quatre des 1300 gouaches de Charlotte Salomon ("Vie ou Théâtre?", tout est conservé au Jewish Historical Museum d'Amsterdam, qui prépare une nouvelle exposition sur Charlotte en juin prochain), puis des pages extraites de Notre combat de Linda Ellia, Seuil, 2007.

Commentaires

  1. « J'ai écrit une opérette, une chose comique, parce que je pense que le rire, même dans les situations les plus tragiques,
    est un élément revivifiant. On peut rire jusqu'à la dernière minute. »
    Germaine TILLION




    La Maison du Rire et de l'Humour de Cluny,

    en Bourgogne du Sud
    Espace muséographique unique en son genre, entièrement dédié à ces thèmes,

    (http://lamaisondurire.fr)

    a grande émotion et grand honneur de vous informer

    de l'attribution à titre posthume

    à Madame Germaine Tillion

    du " Grand Prix national de l'Humour de Résistance ® ",
    prix qu'elle a créé et décerne pour la première fois cette année.

    Ce prix entend tout particulièrement honorer au niveau le plus élevé de cette reconnaissance,

    et contribuer à conserver à tout jamais en nos mémoires, l'extraordinaire et exceptionnelle attitude, unique dans les annales concentrationnaires, dont elle a fait preuve tout au long de son effroyable captivité au camp de Ravensbrück pour tenter de tenir bon, de résister, d'aider ses compagnes de captivité en ce sens et de témoigner aux générations futures de cette folie barbare.

    Cette résistance à la souffrance et à la mort prit la forme et l'expression d'une opérette-bouffe intitulée :

    "Le Verfügbar aux Enfers",

    (Edité aux Editions de La Martinière et en Collection Points Seuil)

    dévoilement des crimes, colère déguisée en rire, coalition de l'amitié, œuvre unique dans l'histoire et le vécu de l'univers concentrationnaire, que Germaine Tillion a écrite et composée cachée des SS dans une caisse en carton.

    Le titre résume parfaitement la démarche de l'auteur en soulignant l'enfer des camps nazis tout en faisant un clin d'oeil à une opérette d'Offenbach ("Orphée aux enfers"): humour noir teinté d'autodérision.

    Quand Germaine Tillion évoque "un camp modèle avec tout confort, eau, gaz, électricité", le choeur répond: "gaz surtout".

    Ce prix sera officiellement proclamé et décerné lors d’une petite cérémonie publique, en la Maison du Rire et de l'humour, le dimanche 25 avril prochain, à 17h30 , à l'occasion de la journée nationale de souvenir des déportés et du 65ème anniversaire de la libération du camp de Ravensbrück, camp dans lequel Le 17 avril prochain, sera jouée cette opérette-revue en version de concert.

    Le Prix sera remis à Madame Geneviève Josua, Première Adjointe au Maire de la commune de Saint Marcel (71), membre de l'association Germaine Tillion et la représentant officiellement; Madame Nelly Forget, sa Secrétaire Générale, qui a été officiellement informée de ce prix, nous a adressé ses remerciements reconnaissants.
    ( http://www.germaine-tillion.org/)


    Votre Présence lors de cette cérémonie honorerait la mémoire de cette admirable femme que fut Germaine Tillion.

    P.S: Merci de bien vouloir nous faire part de votre éventuelle présence: emoulron@wanadoo.fr




    LA MAISON DU RIRE ET DE L'HUMOUR
    a/s Etienne Moulron
    32, rue Lamartine
    71250 CLUNY
    Tel: 06.75.48.31.86/03.85.35.72.26
    email: lamaisondurire@voila.fr/emoulron@wanadoo.fr
    Site: http://lamaisondurire.fr

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