This was meant to be*




Les deux hommes qui ont le plus compté pour moi ont chacun subitement déserté ma vie sans que je m'y sois préparée, hier comme aujourd'hui.

Je ne sais pas s'il faut chercher une logique, ou si l'on doit comprendre ou digérer une quelconque leçon dans ce qui arrive.
Je sais en revanche de façon certaine que poser ces questions-là ne sert qu'à se tourmenter un peu plus, et que c'est un mal insidieux qui sape et qui mine de l'intérieur. Alors j'évite.

Avoir perdu mon papa il y a deux jours me renvoie nécessairement à celui qu'ont perdu mes enfants.
Je déteste penser qu'ils ont la maturité (et le sens amer de la fatalité) qui conviennent pour affronter cette autre disparition. Je déteste penser qu'on puisse leur demander autant, escompter qu'ils soient encore et toujours plus solides et vaillants, parce que ce sont des enfants et parce que c'est difficile.
Au petit garçon il y a bien longtemps qui répondait à son jumeau de frère lui demandant s'il avait peur de mourir que non: "il n'avait pas peur parce que c'est normal, on doit mourir un jour, c'est la vie",  je voudrais à mon tour dire que certes c'est la vie mais là, c'est comme si on vous la déroulait à l'envers. Vous en avez déjà connu le pire, j'aimerais aussi que vous en connaissiez le meilleur.


Et pourtant, ce deuil nouveau transforme radicalement notre petite entité.
Apprenant la nouvelle, ma fille m'a saisi les mains et, malgré ses yeux rougis, son geste m'est apparu si doux, nourri d'empathie et de générosité à mon égard; elle me donnait autant qu'elle recevait, et c'est comme si nous étions soudain arrivées à une sorte de parité dans notre couple mère-fille.

Je suis leur égale désormais: c'est quasi la première chose qui m'est venue à l'esprit mardi matin.




* 'It happened because it was meant to be': j'aime assez peu cette explication frauduleuse et vaine en forme de lapalissade.
Une autre encore est que 'c'était écrit': pas ici en tout cas.



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